D'une nouvelle à l'autre.
Pour mon anniversaire, outre un recueil d'essais de Tolkien et moult
autres trucs sympas, j'ai eu droit au recueil de nouvelles de Mathieu Gaborit, publié par ActuSF en mars 2012. Tout récent, donc. Pourquoi ça tombe bien ? Parce que ce sieur Gaborit est un de mes
auteurs préférés et incarne magnifiquement bien le renouveau français de la fantasy, aux côtés de Jean-Philippe Jaworski par exemple.
D'une rive à l'autre comporte huit nouvelles, toutes sorties dans des anthologies ou bien un fanzine (Un passé trompeur). Elles sont brièvement présentées par l'éditeur (spoil-free !), ce qui permet de resituer le contexte de chaque texte : plutôt baroque coloré, plus sombre, fantastique... tous les styles explorés par Mathieu Gaborit y passent, ce qui permet de ne pas délaisser un genre comme le steam-punk qu'il a exploré à travers un roman écrit à quatre mains, Confessions d'un automate mangeur d'opium.
Encore mieux (ou pas, mais en tout cas c'est cool), ActuSF propose également une interview de l'auteur : si celle-ci ne servira peut-être pas aux fans les plus aguerris de Mathieu Gaborit, elle permet notamment d'explorer ses relations avec le jeu de rôle : il a en effet collaboré à la création de nombreux d'entre eux, dont le grand Agone, tiré des Chroniques des Crépusculaires. L'auteur raconte aussi ses difficultés à écrire et à se soumettre à un genre en particulier.
Et les nouvelles, donc ? Hors de question de dévoiler leur intrigue, parlons de celles qui m'ont le plus touché et/ou qui sont les plus représentatives d'un genre ou de son écriture. Le texte que j'étais la plus impatiente de lire s'intitule Songe ophidien, il raconte un pan de l'histoire d'un personnage central de sa trilogie Les Chroniques des Crépusculaires... avec laquelle j'ai découvert ce monsieur (ou plutôt, qu'une amie m'a fait découvrir =)). Difficile, ici, de ne pas spoiler ; en tout cas l'histoire est prenante, il s'agit de la nouvelle la plus longue, ce qui se comprend : revenu dans un univers particulièrement familier (cf. le coup du jeu de rôle), Gaborit s'est immergé plus longuement dans ce court roman - peut-on, pour celle-ci, parler de nouvelle ? A strictement parler oui, mais je n'en suis pas sûre. L'effet, comme pour toutes les autres nouvelles du recueil, est identique au reste de son oeuvre : on ne peut pas lâcher le bouquin. Vraiment. Deux nuits écourtées de suite, deux matins grignotés pour pouvoir le lire avant que d'autres ne se réveillent - il y a chez moi une sorte d'obligation de socialisation dès le matin, je crois...! La plume est puissante, et nous on suit.
Naissances, elle, m'a laissé une impression plus diffuse, tout comme Mime. Elles ne sont pas dans la veine du héros qui gagne à la fin et tout va bien : le plot de départ est sombre, la fin aussi. Nulle trace de gaieté, même si l'on espère toujours un quelconque revirement de situation - pauvres de nous, biberonnés aux Disneys... Heureusement, il y a des textes un peu plus joyeux, qui nous font croire en l'humanité et... non ? Pardon, on me souffle dans l'oreillette que je confonds avec un certain C.S. Lewis. Au temps pour moi... mais pas tout à fait. Aux frontières de Sienne, petite pépite beaucoup plus colorée et fantasy, se termine bien. Faite d'ondins et de magiciens, elle tire pourtant son origine d'une légende birmane alors que le reste nous oriente plus vers un texte d'heroic fantasy classique - le suspense vachement en rab'.
il y aurait encore énormément à dire sur les autres nouvelles, le mieux reste encore de les lire soi-même... en tout cas, sachez que l'écriture de Mathieu Gaborit ne laisse, en général, pas indifférent : on adore... ou on rejette. J'ai été témoin de cette réaction épidermique en la personne de ma maman, à qui je refile généreusement tous les livres que j'ai aimé/adoré. Pas de chance, la plupart du temps ça marche... pas ce coup-ci. Rassurez-vous, elle va récidiver avec ce recueil, hors de question de ne pas le lire !